LE PERE ET LA MERE dans La famille de Janet paul

 par Paul Janet

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mari -
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pere mere
enfant
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fille
siecle


Messieurs,
Quel que soit le charme du lien qui attache l'homme à la femme dans un ménage bien uni, ce n'est pas pour se livrer au plaisir d'un tel sentiment que la famille a été instituée. C'est l'erreur de nos prédicateurs de roman de nous enseigner que la passion est toute la vie ; même légitime, elle ne l'est pas : elle n'est que l'attrait qui rend plus faciles les devoirs austères de la vie domestique. Or, les plus importants de ces devoirs, ce sont ceux de la paternité et de la maternité. La famille prend un aspect à la fois plus sérieux et plus animé, aussitôt qu'on y voit paraître les enfants.
Quelques uns ont voulu enlever l'enfant à la famille pour le donner à la société, à l'Etat : c'était commettre une grande méprise ; car l'enfant doit appartenir évidemment à ceux sans lesquels il ne serait pas. D'abord, c'est onérer la société d'une charge dont elle n'est point responsable ; et de plus, elle n'a pas de droit sur cet enfant, puisqu'elle n'est attachée à lui par aucun lien précis ; enfin elle n'offre point une garantie sufisante, et on ne peut attendre d'elle qu'une sollicitude vague et générale, si même elle n'est pas partiale en faveur de ceux dont elle espère le plus d'avantages. Au contraire, les parents ont évidemment la charge de l'enfant, puisque c'est par eux qu'il existe ; mais cette charge leur crée par là même un droit ; car comment seraient-ils responsables de cet être qu'ils ont cré, s'ils ne pouvaient en disposer dans une certaine mesure ? Il y a entre les parents et l'enfant un lien physique, un lien de coeur, et un lien de raison : aucune autorité ne repose sur des principes plus naturels, aucune n'est plus necessaire, aucune n'est entourée de plus grandes garanties.
Les parents ont un droit d'autorité sur l'enfant, mais non un droit de propriété. C'était à Rome un abus de l'autorité paternelle, que d'accorder au père le droit de vie et de mort sur ses enfants, le droit de les vendres, enfin d'en disposer comme d'une chose. Tout le pouvoir du père sur l'enfant est limité par l'intérêt et les droits de l'enfant lui-même : au delà de ce qui peut être utile à son existence physique et morale, le père ne peut rien ; il ne peut donc pas avoir le droit exorbitant de condamner son enfant, soit à la mort, soit à l'exclavage. C'était confondre le pouvoir paternel avec la magistrature politique : ce n'est qu'au point de vue de l'intérêt social qu'un être humain peut être mis à mort, ou réduit en captivité : or, le père ne représente pas la société, il représente l'enfant lui-même, il est la raison de l'enfant. La famille ne doit pas plus usurper le gouvernement politique, que l'Etat le gouvernement de la famille. La loi, en France, a donc eu raison de détruire les derniers vestiges de cette autorité mal entendue qui faisait du père un magistrat de police, plutôt qu'un véritable père. C'est une erreur d'en conclure, comme on le fait souvent, à la diminution de l'autorité paternelle ; il est vrai que les fonctions paternelles deviennent par là même plus difficiles ; car n'ayant plus la force, il faut gouverner par la seule autorité du caractère ; mais c'est aussi là qu'est la vérité ; car le père doit être respecté pour lui-même, et non pas comme armé de la force publique.


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L’œuvre de Paul Janet

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